Je
vais vendre le 'punch' dès le début
car ce blog sera plus long que d'habitude: j'ai donné à
ce vin bien commun un score de 3 coupes (la note la plus élevée
selon mon système de notation utilisé ces jours-ci). Incrédule?
Certains auront peut-être même une soudaine charge sanguine qui
fait vibrer les émotions d'un opinion différent. «Mais qui est ce
jeune ignare qui ose classer un grand cru de bourgogne plus bas qu'un
vin commun d’entrée de gamme!?» C'est une réaction qui ne me
surprendrait guère, spécialement de notre société qui idolâtre
l'expert et le statut.
Une chose est certaine: je ne suis pas expert. Mais j'ai réalisé une chose que la plupart des amateurs de vin savent sûrement bien. Un grand vin est un vin mémorable et un vin ne peut être mémorable en lui seul si le contexte oppose ou limite son potentiel. Le grandiose transcende le contenu de la bouteille. C'est une confluence métaphysique qui se grave dans la mémoire comme un instant magique. Une bonne bouteille peut en être le catalyseur ou l'amplificateur, ou vice-versa, mais selon moi, c'est souvent «le verre qui fait déborder l'impression».
L’appréciation du vin est une chose personnelle et bien complexe. La génétique [2], le ph de la salive, les expériences antérieures, le climat, la température du vin, l'heure de la journée, nos attentes, ce que l'on mange, où on est, la musique qui joue, les gens avec qui on partage ce moment; tout ça affecte notre perception. On a beau avoir la meilleure mémoire gustative et olfactive, l’irrationalité domine toujours les passions. Vous lirez 'Thinking, Fast and Slow' de Daniel Kahneman si vous croyez autrement.
Pour
moi donc, un grand vin est un vin qui amplifie le moment. C'est un
vin qui nous rend un peu mou dans les genoux car il stop le temps qui
nous entoure afin de nous faire apprécier l'essentiel. C'est un vin
qui centre notre être dans l'univers et nous fait vibrer de bonheur.
J'oserais une hypothèse que c'est souvent dans la nouveauté qu'on
découvre un tel grand vin. Il y a tellement de vins différents et
encore plus de moments, que comparer l'unique devient une bataille
parfois perdue d'avance selon moi.
Il
faudrait bien que je parle de la bouteille un peu aussi j'imagine...
Il
y avait la petite bague qui trônait au goulot indiquant la
bénédiction du gourou Parker avec 89 points. Je ne l'avais pas
achetée pour ça mais plutôt pour le prix – pour ma degustation de vins <$15. C'est une bouteille que nous n'avions pas ouverte
finalement ce jours-là. Je l'amena donc
pour une nuit de camping au sanctuaire d'oiseaux des Milles-Iles, un joli petit camping tranquille a
moins de 2h de Montréal, pour accompagner le magret grillé au grand
air. J'ai un aveu: je peux me passer de beaucoup de chose en camping,
mais j’amène des verres Riedel Ouverture – pour reprendre les
paroles d'un grand homme: Je ne m'exile pas volontairement pour
pâtir! Donc dans ce verre, il y avait du fruit, un boisé soyeux,
une longueur agréable, une plénitude et une digestibilité sans
pareil pour ce petit prix. Mais surtout, beaucoup de bonheur et un moment mémorable...
Code SAQ : 00539528CDN $12,50
Amenez-le
en camping, vous m'en donnerez des nouvelles...
P.S. Si
je le goûte à nouveau, lors d'une
occasion différente, il se pourrait bien que ce vin mérite 2 ou
même une seule coupe...il ne faudrait alors pas être surpris...